Maire perpétuel en Artois en 1694 ?

Dans mon ignorance je pensais les maires issus de la révolution française et les échevins certes du nord mais faisant fonction de maire dans l’ancien régime. Imaginez ma surprise quand dans mes recherches concernant mon ascendance du nord, je croise un  Jean Adrien  Larsé ou Delarsé, maire de Lillers en 1694. Jean Adrien prénom bien masculin donc pas mère (!) mais bien maire et un autre ancêtre  » échevin à son tour », Guillain Martin menuisier né vers 1685 échevin de la ville de Pernes.

Une première recherche dans le dictionnaire historique et archéologique du Pas-de-Calais (tomme 3) sur Jean Adrien Delarsé nous amène à LILLERS , aux coutumes de la ville. Jean Adrien Delarsé y est présenté comme le premier maire de Lillers ville seigneuriale  en 1694, premier maire en vertu de l’Edit de 1692 qui rendit vénales les charges municipales. Cet Edit du roi de 1692 est alors un mystère. Quelques recherches plus loin;

Edit du Roy [d’août 1692] portant création de maires perpétuels et d’assesseurs dans les hostels de villes et communautés du royaume.

LOUIS par la grâce de DIEU Roi de France et de Navarre,  à tous présents et à venir, SALUT;

le soin que nous avons toujours pris de choisir les sujets les plus capables entre ceux qui Nous ont été présentés pour remplir la Charge de Maire dans les plus grandes villes de notre royaume, n’a pas empêché que la cabale et les brigues n’aient eu le plus souvent beaucoup de part à l’élection de ces Magistrats; d’où il est presque toujours arrivé, que les officiers ainsi élus, pour ménager les particuliers, auxquels ils étaient redevables de leur emploi et ceux qu’il prévoyait pouvoir leur succéder ont surchargé les autres habitants des Villes et surtout ceux qui leur avait refusé leurs suffrages. Et à l’égard des lieux les maires ne sont point établis, chacun de nos Juges voulant s’en attribuer la qualité et les fonctions à l’exclusion des autres, cette concurrence n’a produit que des contestations entre eux, qui ont retardé l’expédition des affaires communes, consommé en frais de procès, et distraits ces juges de leurs véritables fonctions, pendant qu’il s’efforçaient d’usurper celles qui ne leur appartiennent pas, et fatiguer nos peuples par la diversité des ordres qui leur étaient donnés en même temps sur les mêmes affaires.

C’est pourquoi Nous avons jugé à propos de créer des Maires dans toutes les villes et lieux de notre royaume qui n’étant point redevable de leurs charges au suffrages des particuliers et n’ayant plus lieu d’appréhender leur successeurs, en exerceront leurs fonctions sans passion et avec toute la liberté qui leur est nécessaire pour conserver l’égalité dans la distribution des charges publiques; d’ailleurs en étant perpétuels, ils seront en état d’acquérir une connaissance parfaite des affaires de leur Communauté, et se rendront capables par une longue expérience de satisfaire à tous leurs devoirs et aux obligations qui sont attachées à leur ministère; et d’autant que dans les principales Villes de nôtre Royaume, le grand et l’importance des affaires qui y surviennent fort souvent, demandent le secours et l’application de plusieurs personnes d’expérience et zélées pour le bien public, Nous avons cru qu’en donnant aux communautés un Chef ou premier Officier éclairé, Nous devions en même temps créer en titre d’Office un certain nombre de conseillers et assesseurs, tirés d’entre les plus notables Bourgeois, qui se rendant plus capables que les autres, de remplir les Charges….(morceau de page manquante).

Cette première partie justificative m’a paru suffisamment importante pour être retranscrite intégralement. Le roi y explique pourquoi il crée de nouvelles charges. La deuxième partie est le résumé des droits et devoirs du nouveau maire. Il parle de leurs nouveaux privilèges dont le titre de noblesse.

« Ils convoqueront les assemblées générales et particulières esdits Hostel de Ville, ou il s’agira de l’utilité publique, du bien de notre service et des affaires de la communauté.

Ils recevront les serments des échevins, des capitouls, jurats, consuls et autres pareils officiers, après qu’ils auront été élus, dans les Assemblées tenues es Hôtels et Maisons des villes, auxquels présideront les dits maires, sans que l’on puisse à l’avenir, faire ailleurs les dites élections. ….

Ils présideront à l’examen des comptes.

Les greffiers ne pourront expédier aucun ordre qu’il ne soit signé des maires.

L’ouverture des lettres et ordres ne sera faite qu’en présence des maires.

Ils allumeront les feux de joie et porteront la robe rouge.

Ils jouiront du titre et privilège de noblesse dans les Villes où il a été par nous rétabli et confirmé…

Ils seront exempts de tutelle,  curatelle, de la taille personnelle dans nos Villes taillables , de guet et garde dans toutes nos Villes, du service du ban et arrière ban, du logement des gens de guerre, et autre charges et contributions…

Faisons défense de plus élire et nommer à l’avenir aucun maire.

Défense à nos officiers d’en prendre à l’avenir la qualité de maire, d’en faire aucune fonction dans les hôtels de ville et autres lieux (3000 livres d’amende).

Suppression des anciens maires leur titre et qualité.

Attribution des gages et des paiements sur les simples quittances des maires.

Créations d’assesseurs héréditaires.

Il s’ensuit les fonctions et privilèges des assesseurs.

Le roi a donc créé dans la plupart des villes un office de maire et des offices d’assesseurs en remplacement des syndics choisis par les habitants, pour les raisons citées dans l’Edit d’août 1692 mais aussi pour une raison moins avouable, les caisses de l’Etat étaient vides. La création de nouvelles charges payantes va donc les aider à les renflouer .

Quentin Metsys, les collecteurs d’impôts.

Le Maire ou maïeur faisait parti de l’échevinage comme les échevins. Il y avait également un procureur syndic un greffier et un argentier. l’échevinage gérait et administrait les affaires de la ville; il y exerçait la haute moyenne et basse justice; ils se réunissaient trois fois par semaine (Bultel, notice d’Artois)

Au vu de l’importance de la fonction je suis surprise de ne pas avoir noté plus de maires en fonction à cette période dans les archives.

Jean Adrien Larsé décèdera le 4 mars 1700 à Pernes à l’âge de 50 ans. Son fils , Jean Baptiste fut maire également à Arras où il est cité en 1717.

Jacques LeTellier, maréchal des logis et la bataille de Fontenoy.

Cet acte de mariage a piqué ma curiosité. Qu’est ce qu’être maréchal des logis au milieu du 18e siècle, et quel est ce régiment, le régiment d’Egmont ?

Mes connaissances en matière militaire sont très limitées, j’ai donc recherché une définition qui, si elle est logique, m’a surprise. A l’origine, le maréchal des logis était un sous-officier responsable des écuries et chargé de préparer les étapes de son escadron, comme le ravitaillement ou l’hébergement. Il était historiquement dans des troupes dotées de chevaux.

Dans la France du 18e, le maréchal des logis correspondait au sergent des troupes montées. Savoir bien lire et écrire était une condition nécessaire puisqu’il devait tenir les registres des logements des officiers et des soldats de la compagnie. Hormis  ses connaissances d’écriture il devait avoir des talents logistiques et géographiques. Lors d’une bataille, le maréchal des logis ne participait pas au combat, mais se tenait prêt à transmettre les ordres, porter un courrier. Son rôle prenait toute son importance entre les combats. Lorsque la destination était choisie, le maréchal général des logis devait reconnaître le chemin à parcourir, trouver un emplacement pour le nouveau camp. Il rédigeait ensuite les ordres détaillés que devaient suivre chaque colonne après approbation du général en chef . En effet, l’armée  devait se déplacer en un seul bloc, dans un ordre proche de l’ordre de bataille pour pouvoir agir plus rapidement dans des chemins plus ou moins étroits ce qui devait être un casse-tête pour le maréchal général  des logis. La colonne centrale marchait sur le chemin, les colonnes latérales dans les champs… Les ordres étaient ensuite transmis au maréchal des logis de la cavalerie et aux maréchaux des logis de chaque régiment. À l’arrivée sur le lieu prévu pour le campement, le quartier général était placé  au centre ainsi que l’artillerie , l’hôpital et les vivres, l’ordre de bataille était toujours respecté. L’installation et la levée du camp demandait alors un grand sens de l’organisation et un temps considérable.

Cet ancêtre n’était pas maréchal général des logis des armées du roi mais maréchal des logis du régiment d’Egmont.

Deux régiments ont reçu le nom de régiment d’Egmont

Le régiment d’Egmont cavalerie, ancien régiment du Chevalier de Rosen cavalerie en 1741, est nommé régiment de Charost cavalerie en 1757 ;
le régiment d’Egmont dragons, ancien régiment de Mailly dragons le 14 février 1744, est nommé régiment de Marbeuf dragons le 11 juillet 1753.

Donc entre 1744 et 1753 ont coexisté deux régiments d’Egmont. Les deux « Egmont » étaient ils deux frères ou encore cousins?  L’histoire ne le dit pas.

Le premier régiment d’Egmont était un régiment de cavalerie légère. Auparavant, régiment de Valavoire cavalerie crée en 1667, renommé le 6 mars 1719 régiment de Lorraine cavalerie, dirigé par Jacques Henri de Lorraine, chevalier de Lorraine, marquis d’Ambleville, il devint régiment du comté de Lordat en 1734, puis du chevalier de Rosen en 1738, du Comte d’Egmont en 1741,  d’Egmont le 14 février 1744, frère du précédent, Casimir Pignatelli.Ce régiment fut dissous le 1er décembre 1761.

La devise de ce régiment d’Egmont cavalerie était alors;

Qui s’y frotte s’y pique,

en Latin

pungit aggredrentes.

Le deuxième régiment d’Egmont aussi appelé Le régiment des dragons de Monsieur était également un régiment de cavalerie.

En janvier 1746, ce régiment était à Maubeuge si on en croit le maréchal de Saxe. 

Le maréchal de Saxe était alors en campagne dans les Flandres ou plus exactement c’etait la guerre de succession d’Autriche (1740-1748) avec un point culminant , La bataille de Fontenoy le 11 mai 1745. Le régiment d’Egmont est mentionné dans la brigade des cuirassiers  du roi et le régiment d’Egmont dragons dans la réserve du comte d’Eu.

la bataille de Fontenoy par Pierre Lenfant.

Mes souvenirs de cette bataille se résumaient à une victoire française et à la fameuse phrase « Messieurs les anglais, tirez les premiers », un bon mot écrit par Voltaire. Avec cet ancêtre c’était  l’occasion de se replonger dans cette bataille.

Marie Thérèse d’Autriche monte sur le trône à la mort de son père Charles VI, ce qui a semé la pagaille entre les grandes puissances européennes. Louis XV alors allié de l’Electeur Charles-Albert de Bavière lance ses troupes sur les Pays-Bas autrichiens (Belgique actuelle). Le maréchal de Saxe, commandant des armées du roi fait le siège de Tournai, mais est pris en tenaille par les armées alliées commandées par le duc de Cumberland, troisième fils du roi d’Angleterre, Georges III.

Le maréchal de Saxe en fin stratège choisi le terrain, dispose ses troupes en ligne brisée, et le 11 mai la bataille commence par deux heures de canonnade. La bataille se resserre vers midi quand Cumberland envoie ses troupes en masse. C’est là qu’aurait eu lieu le célèbre échange réécrit par Voltaire ce qui s’avère une fausse politesse, puisque celui qui tire le premier est ensuite démuni devant l’adversaire. Cela a failli mal tourner pour les français mais le maréchal décide d’utiliser quatre canons à bout portant lance des attaques coordonnées sur les flans ennemis et remporte la victoire. Il y eu 8000 morts chez les anglais, 2000 chez les hollandais et 3000 pour les français.

Voila  comment Jacques Le Tellier, maréchal des logis du régiment d’Egmont, m’a fait réviser l’histoire de France et la bataille de Fontenoy à laquelle je suppose qu’il dut participer dans le cadre de son régiment. Quant à savoir s’il faisait parti du régiment d’Egmont cavalerie ou du régiment dragons, je laisse les spécialistes en débattre.

Migration militaire au 18ème et acte de mariage.(2)

Jacques Le Tellier fait parti de ces ancêtres voyageurs. C’est un ancêtre du Pas-de-Calais, qui vécut du côté de Frévent, au nord d’Amiens, à 40 km d’Arras, comme ses descendants entre Frévent, Neuville-au-Cornet. Son acte de mariage ne présentait ni surprise ni difficulté. En 1758, il est veuf et vit à Frévent.

L’an 1758 le 9 du mois de janvier après avoir publié par deux dimanche et une fête savoir le 27 novembre, le 25 décembre 1757 et le 6 de cette présente année à la messe paroissiale entre jacques le Theillier de la paroisse de St hilaire de Frévent veuf de marie anne Courcol d’une  part et marie françoise Frevacque âgée de 38 ans environ, fille d’albert et de madeleine Finet de cette paroisse d’autre part, ayant reçu la lettre du sr Cornu curé de St Hilaire en date du 7 janvier 1758, ayant reçu leur mutuel consentement de mariage et leur ay donné la bénédiction nuptiale selon les cérémonies de l’église présents et consentants leurs parents et amis, à savoir nicolas lefebvre, marié de la paroisse de Frévent, antoine Rulence marié de cette paroisse,, louis Petit jeune homme à marier de la paroisse de la Comté jean baptiste Caron arpenteur de la province d’Artois, tous témoins qui ont attestés ce qui dessus sur le domicile l’âge et la qualité des parties , qui ont signés avec l’époux et l’épouse.

AD 62, 5 MIR 348/1 Foufflin-Ricametz, 1737.1832

Rien dans cet acte ne nous renseigne sur l’origine de Jacques le Tellier, ou plus exactement le curé et les témoins attestent qu’il est de la paroisse de st Hilaire de Frevent(62).  Il arrive que les bans ne soient pas publiés à l’extérieur. Quand il s’agit d’époux jeunes et célibataires, une dispense du diocèse est nécessaire et souvent notée, mais quand il s’agit d’un veuf ou veuve ou encore d’un célibataire âgé ou habitant depuis longtemps dans la paroisse on ne pourra que rechercher l’acte de mariage précédent ou l’acte de décès. C’est le cas de Jacques Le Tellier.

G Courbet.

Il est indiqué qu’il est veuf et c’est donc l’acte de mariage précédent que je recherche. Le 21 janvier 1749, eut lieu un premier mariage entre Jacques le Thellier, et Marie Anne Courcol.

Jacques THELIER, âgé d’environ 40 ans, maréchal des logis
dans le régiment d’Egmont demeurant depuis 3 mois en cette
paroisse, fils d’Antoine demeurant en la paroisse Humbepaire proche
de la ville de Baccarat en Lorraine diocèse de Toul et de défunte Marie Thérèse ( nom illisible
dans le pli du registre).
Marie Anne Bayencourt dite Courcol, fille de Jean Georges et
Marie Anne Devillers….

Il est originaire de Lorraine, de la région de Baccarat et réside en tant que militaire dans la paroisse de Frévent (62) . Il a les autorisations de ses supérieurs pour se marier, il a 40 ans et est maréchal des logis dans le régiment d’Egmont.

Il signe alors jacque le tellier. Il est à 500 km de son lieu d’origine, et va faire souche dans le Pas de Calais, puisqu’il décédera en 1768 à Frevent. La recherche de son ascendance est difficile. les registres de Baccarat avant 1765 ne sont pas en ligne, mais il a bien existé bien une famille Tellier ou le tellier du coté de Baccarat. Un Nicolas Le Tellier était maitre chirurgien à Humbepaire avant 1732, époux de Jeanne Le Mare, il eut au moins une fille Anne vers 1685. Un autre Letellier prénommé Claude est né vers 1671 à Baccarat et était maître chapelier. Mais rien sur la naissance de Jacques Le Tellier vers 1712, ni sur son père Antoine ou sur sa mère Marie Thérèse Oger. Jacques eut deux frères François et Claude, et une sœur Barbe, nés à Lunéville(54) ou à Neufmaisons (54) en Meurthe et Moselle dont je n’ai pas trouvé la descendance.

De son premier mariage, Jacques Le Tellier eut 5 enfants dont un seul a une descendance connue (généanet). Jacques LETELLIER fils, né en aout 1752 à Frevent eut lui-même 9 enfants. Plusieurs lignées sont issues de son union avec Charlotte Langrenne dans le Nord ou dans la Somme et ont gardées l’orthographe de LETELLIER.

De son mariage avec Françoise Frevaque il eut 4 enfants:

Le premier fils, Henri joseph né en 1758, épousa en premières noces en 1794 Marie Angélique Beugnet il eut alors 3 enfants. Veuf en 1805, Henri épousa Emilie Cousin et eut 4 enfants. Des 7 enfants seuls les mariage de Henri Joseph et de Pierre Joseph sont connus. La branche de Henri Joseph s’installa à Pressy les Pernes à partir de son mariage avec Augustine Henriette Josèphe Picque en 1836, il est mon ascendant. La branche de Pierre Joseph, blatier à Marest, s’installa à Pressy vers 1844. Cette descendance a gardé l’orthographe LETHELLIER.

Le second fils, Antoine né en 1760 il épousa Marie Rose Theret avec qui il eut un garçon puis Marie Angélique Carette en 1806 avec qui il eut 6 garçons. Au recensement de 1836 à Neuville au Cornet, 5 garçons sont encore présents auprès d’Antoine qui a alors 75 ans. Pierre 26 ans est soldat, 1er chasseur à Dieval, Eugène 24 ans charpentier, François 21 ans couvreur de paille, Antoine 17 ans quincaillier, Frédéric 15 ans. Leurs descendance m’est inconnue.

Le troisième fils, Louis Joseph né en 1761, s’est marié en 1794 à Marie Thérèse Fournet, sa descendance m’est inconnue.

Marie Rose Joseph née en 1764 épousa Jean Baptiste Rulence et eut 4 enfants.

l’an 1768 le 5 de décembre les 5 heures du soir est décédé muni des sacrements de l’église Jacques Theillier veuf de marie anne de baillencourt dit courcol âgé d’environ 53 ans marié en seconde noces à marie françoise frevacque …
Frevent 5 MIR 361/2 1666-an I

signature Jacques Le Tellier 1749 AD 62

 

Le motif de sa migration est clairement militaire. A noter que l’orthographe de son nom a changé au fil du temps, Tellier, le Tellier, le Theillier, puis maintenant Lethellier ou Letellier.

 

Migrations de nos ancêtres et actes de mariage. (1)

Nos ancêtres se déplaçaient, mais la notion de voyage comme on la conçoit aujourd’hui n’existait pas. Nous avons une autre compréhension de ce phénomène qui a changé depuis 1946, date des congés payés.

Quand nos ancêtres se déplaçaient, ils le faisaient pour une bonne raison. Ils parcouraient relativement facilement une dizaine de kilomètres pour se marier ou encore pour changer de travail, d’habitation, ce que l’on peut appeler micro-mobilité mais je veux parler d’une autre sorte de voyage, celle où ils parcouraient une centaine de kilomètres voire plus, pour ne plus revenir, le voyage sans retour celui où ils ont radicalement changé de milieu et de genre de vie.

Bonjour Monsieur Courbet, Gustave Courbet(1854). Musée Fabre.

Les actes de mariage ont le plus grand intérêt pour l’étude de ces migrations. Ces actes se rencontrent dans toutes les paroisses où la tenue des registres est obligatoire depuis 1736. Le curé doit en effet signaler la publication des bans dans les paroisses d’origine des époux, cela concerne toutes les couches sociales, qu’ils soient bourgeois, artisans, laboureurs ou journaliers. En règle générale il s’agit d’un renseignement sûr, qui indique si oui ou non les mariés habitent la paroisse où est célébrée l’union; Par contre il ne faut pas perdre de vue que le mariage est le plus souvent célébré dans la paroisse où est domiciliée l’épouse et que les bans étaient publiés au domicile des parents. Ces derniers pouvaient changer de paroisse entre la naissance et le mariage de leurs enfants.

J’ai ainsi découvert au moins quatre ancêtres.

1. Guillaume COURTINES (Sosa 272 ascendance Bacond-Courtines) se marie à Tonneins dans le Lot et Garonne le 23 mai 1744;

le 23 mai 1744 après avoir proclamé les 3 bans du mariage contracté entre
Guillaume COURTINES coutelier natif de MILLAU en ROUERGUE habitant de cette paroisse et
Jeanne BARAILLAC fille de feu Gédéon et d’Anne DUPON de lyle de cette paroisse
sans opposition ni empêchement civil ni canonique je soussigné les ai conjoints en légitime mariage par paroles le présent ayant précédemment fiancé à l’église en présence Pierre Larmet, Claude Corret, charles dupuy, jean laroque,qui n’ont signé pour ne savoir pour ce enquis
delorman archiprêtre (AD Tonneins 47)

Il était coutelier, natif de Millau en Rouergue, et l’âge de son décès 57 ans en 1781, donne une date de naissance approximative en 1724. Cette branche reste encore à explorer, le mariage n’étant pas filiatif. Mes recherches, geneanet et autres n’ont pas donné de résultats évidents.

2. François Bacond (Sosa 280, génération 9) épouse Marie Gadail le 25 août 1739 à Clairac.

le 25 août 1739, après les fiançailles à l’église, la proclamation des bans du mariage contracté entre François BACON garçon chapelier fils légitime de pierre BACON et de Françoise CHARPEAUTIER de la paroisse de TANCE diocèse de PUY en Velay d’une part et Marie GADAIL fille de pierre et d’Anne Mauri de la paroisse de Clairac d’autre sans empêchement ni opposition vu le certificat du sieur Fauri curé de la dite paroisse du Tance en date du 24 juin 1739 avec son consentement au dit mariage la dite marie ayant ayant promis et juré mettant la main sur le saint évangile qu’elle voulait vivre et mourir dans la religion catholique apostolique et romaine confessant à cet effet toutes les vérités que la même église nous enseigne de croire et renonçant à toutes les … de Luther et Calvin je soussigné curé dudit Clairac après avoir pris leur mutuel consentement leur ay solennellement imparti la bénédiction nuptiale dans l’église dudit Clairac suivant la forme et cérémonies ordinaires prescrite par l’église en présence de Louis Perache compagnon chapelier, de Pierre Chaudruc maître de bateau, de pierre Baussens compagnon charpentier, de jean Dulon aubergiste, de Jean Lassale et de sr Jacques Arboussé de la présente paroisse lesquels Lassale et Arboussé ont signé non les contractants non plus que les autres témoins pour ne savoir de ce enquis.

AD 47 Clairac,

Marie était protestante. En 1739, la conversion est exigée par le curé pour qu’il prononce la bénédiction nuptiale. Celle-ci fut surement prononcée du bout des lèvres par Marie Gadail car ses descendants furent tous protestants jusqu’au XXe siècle. Par contre c’est une difficulté pour retrouver les actes de naissances, les règles devenant plus « souples » entre 1745 et 1765, date où l’on voit réapparaître des registres tenus par des pasteurs protestants.

François Bacon émigra vers 1739, Guillaume Courtines vers 1744 et tous deux vers le Lot et Garonne, la région de Clairac.

3. Plus tard il y eut Gilles VACHER, né à Chinon le 11 mai 1741. Il se maria à Melle St Pierre le 29 juillet 1765 avec Jeanne LEMAURE.

aujourd’hui 29 juillet 1765 après les publications canoniques des promesses de mariage entre Gilles VACHER cloutier fils légitime de Louis Vacher cloutier et de Madeleine Bougeat demeurant en la ville de Chinon ledit Gilles Vacher en cette paroisse et Jeanne LEMAURE fille légitime de Jacques Lemaure charpentier et de Jeanne Brisson de cette paroisse n’ayant découvert aucun empêchement nous avons conjoints les dites parties en épousailles et leur avons donné la bénédiction nuptiale en présence de Jean Morelle, chargé de la procuration du père et de la mère dudit Gilles Vacher pour assister avec à leurs épousailles, de Jeanne Brisson de Jacques Lemaure père et mère de ladite Jeanne Lemaure Jacques Chatagnion et autres qui ont déclaré ne savoir signer hors les soussignés .
MELLE B,M,S/ 1741-1792 (vue 172)

 

Les deux premiers émigrent à la même période, dans des villes  proches, historiquement protestantes; hasard, où volonté? Clairac, Tonneins étaient-elles des villes connues pour un artisanat particulier? la coutellerie peut-être puisqu’il existait une rue des couteliers à Clairac?

Guillaume Courtines, aura un fils Jean Baptiste, coutelier un petit fils Jean, coutelier à Clairac, un arrière petit-fils Jean, coutelier rue des couteliers. La lignée des couteliers s’arrête là.

François Bacond est dit garçon chapelier en 1739 et assisté d’un maître chapelier le jour de son mariage, maître chapelier en 1744, il est fils de chapelier. Il décédera jeune, en 1751 à 40 ans en laissant des enfants de moins de 10 ans. Ces derniers ne seront pas chapeliers, mais charpentiers.

Faisaient-ils partis de corporations, étaient-ils compagnons et leur migration était elle dans le cadre de leur apprentissage? Leur destination était elle une fuite, le fruit du hasard ou une décision ferme?

Un autre temps, une autre région, ils étaient cloutiers, ou couteliers, ou encore chapeliers. Ils avaient en commun d’être des artisans qui pouvaient se déplacer avec leur simples outils, n’avaient pas de propriétés, ni terre, étaient sûrement jeunes.

Il existe une autre forme de migration, la migration militaire.

A suivre….

 

 

Généathème et prénoms Numa et Mina.

Je me prête avec un certain plaisir au thème de ce mois suggéré par « la gazette des ancêtres ». En effet les prénoms représente ce qui reste avec certitude de nos aïeux et ils sont parfois surprenants. J’ai hésité à vous écrire sur Mundine Peletengeas ou encore Peronne Barbut, il y eut aussi les filles Patureau Laborie, Marie Amélie, Jeanne Judith, Sara Zenobie, Clémentine et Nanci, mais j’ai choisi Jean Paul Hector Numa Desage né à Clairac en 1868, décédé à La Crèche en 1953 et son épouse Nelly Louise Mina Moreau qui m’a inspiré le titre de ce blog.

Numa Desage est mon arrière grand-père, le pharmacien de 1ere classe exerçant à Pamproux (79) à partir de 1903 puis à la Crèche (79). Le prénom Numa m’a toujours intrigué, de même que Hector, dans une famille de tradition protestante très classique.

Trois fées au dessus du berceau de la belle au bois dormant,(W.Disney)

C’est en regardant l’ascendance de Numa que je repérais un autre Paul Numa, très proche et vraisemblablement son parrain, son oncle Paul Numa Courtines, instituteur, frère aîné de Anne Iréna Courtines (Sosa 17), époux de Elisabeth Azema Bergeret, vivant à Tonneins (47), ville proche de Clairac (47). Paul Numa Courtines est né en 1830, aîné car ses frères Hyppolite (1826.1831) et Laudis (1827.1832) sont décédés en bas âge.

Hyppolyte, Laudis, Paul Numa, et Anne Iréna sont les quatre enfants de Jean Courtines, coutelier rue des couteliers à Clairac et Suzanne Bacond (Sosa 35). Mariés en 1825, je me demande bien d’où leur est venu l’inspiration pour donner des prénoms aussi originaux à leurs enfants. Il ne s’agit pas de prénoms du calendrier révolutionnaire comme Raisin, Amarante ou encore scorsonère.

Hyppolite, fils de Thésée dans la mythologie grecque, est l’homme qui déclencha la colère de Phèdre. A Rome au 3eme siècle il fut le premier antipape, auteur d’ouvrages théologiques, exégétiques et canoniques importants.

Laudis ? serait un prénom dérivé du latin Laus, Laudis, f dans le sens de louange.

Numa ; dérivé du grec nimos, la loi, c’est aussi le prénom du deuxième roi légendaire de Rome, Numa Pompilius qui règna de 715 à 672 av J.C. on lui attribua l’organisation religieuse de la cité et son calendrier liturgique. Longtemps utilisé par les romains, le prénom tomba en désuétude.

Le prénom Iréna (Sosa 17) est dérivé d’Irène et signifie paix. Sainte Irène fut persécutée avec ses deux sœurs pour avoir caché des livres Saints, refusé de manger de la viande sacrifiée aux dieux et jetée vive sur le bûcher à Thessalonique en Grèce le 1er avril 304.

Le choix des prénoms par Jean Courtines et Suzanne Bacond semble avoir trouvé leurs racines dans l’histoire romaine et les Saintes Écritures, ou peut-être pas….qui peut le dire.

Numa Desage (Sosa 8) épousa en 1899 Nelly Louise Mina Moreau (Sosa 9).

Mina un autre prénom peu courant, issu d’origines diverses, germanique , anglophone, et japonaise. Il est le diminutif affectueux du prénom germanique Wilhelmine, qui est lui même le dérivé germanique de Guillaume . le prénom Mina apparaît en Grande Bretagne au XIXe siècle.

Signification; le prénom est un dérivé des deux termes germaniques qui signifient « heaume » et « volonté ».

Étymologiquement c’est le diminutif et dérivé de jasmin, qui vient du persan « yâsimin ». C’est un arbuste à fleurs jaunes et Mina est donc un prénom fleur. Les « Jasmine » ont pour patronne sainte Fleur qui fut une des premières religieuses à sortir de son monastère vers 1300 pour se porter au service des malades.

Nelly, Louise, Mina Moreau née en 1874 était la fille unique de Pierre Moreau et de Marie Suzanne Proust. Louise était le prénom de sa grand mère Louise Suzanne Proust, mais aucun prénom dans ses ascendants ne peut expliquer cette inspiration. Ses cousines se prénommaient Alice Louise Clotilde, Louise ou Modeste, ou encore Marie-Louise Augustine. Si Louise est un prénom commun à toutes la famille, les prénoms de Nelly et Mina semblent être sortis de nulle part.

Par contre, je n’ai pas trouvé d’ancêtre prénommée Philomène.

Bilan 2017 et chemin de traverse.

Je vais éviter les chiffres, ils ne refléterons pas mon travail. Qu’ai-je donc bien pu faire cette année?

Comme prévu, j’ai travaillé sur l’ascendance de Pierre Moreau, instituteur. Les traces en sont discrètes, les mariages tardifs, ils eurent peu d’enfants et sont protestants de père en fils jusqu’à Pierre Moreau. Tout en retraçant leur ligne de vie, je me suis donc orientée vers l’histoire des  protestants. La vie de cette famille se fond dans la page plus grande de la religion réformée. C’est naturellement que j’ai recherché sur la toile, sur Gallica en particulier à comprendre et retracer leur chemin, et j’y ai passé du temps…

2017 était également un anniversaire important pour le protestantisme, C’était les 500 ans de la Réforme. C’est en affichant le 31.10.1517, 95 thèses contre les « indulgences » sur la porte de l’église du château de Wittenberg ( Saxe) que Martin Luther a jeté les bases d’une nouvelle religion chrétienne. Le 31 octobre 2017 cet anniversaire a été fêté dans toute l’Allemagne. Cette année de commémoration fut une année de manifestations culturelles, il y eut même une figurine Playmobil de Luther vendues à plusieurs millions d’exemplaire.

J’ai assisté, dans le Poitou des manifestations à La Couarde dont j’ai déjà parlé, en particulier à une conférence sur l’exil des protestants, une autre sur la psychogénéalogie ainsi qu’une journée de formation sur la généalogie protestante en Poitou. J’ai apprécié tous ces échanges ainsi que les ouvertures  sur le monde protestant. Je remercie en particulier «  genea79 » sans qui je n’aurait pas eu ces informations.

La Rochelle, qui fut très active au moment de la réforme, place forte protestante en son temps, fit également une exposition sur cet événement au « musée rochelais d’histoire protestante ». La ville a fait partie des 5 villes françaises et 96 en Europe à s’inscrire dans le réseau labellisé « cité européenne du 500e anniversaire de la réforme ».

Il y eut peu de travail sur les archives départementales, encore moins de visite, mais des rencontres, comme celle du Cercle généalogique Poitevin à l’occasion des « rencontres régionales de généalogies » à La Rochelle en octobre, des lectures. Voila ma généalogie ne s’est pas passée dans les registres cette année mais plutôt dans des lieux avec des rencontres intéressantes. Ce qui finalement n’est pas plus mal et dépoussière un peu l’idée que l’on a de la généalogie. Je n’ai pas passé un mois comme prévu sur la généalogie de Pierre Moreau, mais plutôt 8 mois à doses homéopathiques.

Alors, que dire pour 2018 ? Continuer à écrire sur le blog pour tracer mon travail, me parait une bonne résolution, nettoyer mon fichier Hérédis, relire, corriger mes erreurs également, mettre à jour geneanet, pas de grands projets…

Généathème et bonheurs généalogiques.

Quelle bonne idée de partager nos bonheurs généalogiques comme le suggère Sophie Boudarel, même si c’est chez moi, un assemblage plutôt hétéroclite.

Mon activité n’a pas été débordante cette année , plutôt débordée. J’ai malgré tout passé de bons moments avec mes ancêtres.

Je pense aux registres d’Exireuil, les commentaires si particuliers du curé sur les décès de ses paroissiens et l’aventure des recherches qui ont suivies. Ce fut comme un fil que l’on tient et que l’on tire pour dérouler la pelote de laine. J’ai « suivi  le fil d’Ariane ».

La découverte de la signature d’un ancêtre procure toujours une belle émotion. C’est la trace tangible de leur existence. Ce fut le cas récemment avec mes ancêtres du nord, dans les registres de Pernes (62) dans les années 1700.

Les messages des cousins du nord que je ne connais pas, qui se sont manifestés, et m’ont gentiment proposé leur aide, furent un autre bonheur généalogique. Je n’ai pas beaucoup travaillé cette année sur l’ascendance du nord, mais promis, je les mets au programme l’année prochaine.

J’ai découvert au travers des conférences un lieu protestant du Poitou, La Couarde, le centre Jean Rivierre . Ce fut une source d’inspiration pour mes articles sur les protestants de même que le 500 e anniversaire de la réforme (31.10.1517) et les manifestations qui y ont été rattachées .

Berlin 2017

Et si finalement tous ces petits bonheurs se résumaient au plaisir d’ écrire un blog pour raconter et partager toutes nos histoires? Mes articles sont souvent le reflet de tous ces moments généalogiques et les relire ravive ces histoires, leurs recherches ou encore les événements de l’année.

Mais je dois vous dire que mon plus grand bonheur cette année n’est pas généalogique même si …

Je suis l’heureuse grand-mère depuis  juillet de deux magnifiques petites filles Mina et Clara.

Si je vous dis que Mina était le troisième  prénom de Nelly….

La généalogie n’est jamais bien loin.

 

 

 

Reconnaître un décès protestant en Aquitaine .

Souvent j’ai évoqué mes ancêtres protestants du Poitou. Il est une autre branche tout aussi protestante, celle du Lot et Garonne, de Clairac et ses environs. C’est donc en parcourant ces archives que j’ai relevé quelques mentions originales, en particulier à St Saturnin de Marsac.

Comme dans le Poitou, l’ histoire commence en 1685, ainsi que nous le conte le curé Rebet dans un langage très modéré.

Aujourd’hui 1 er septembre 1685, les soussignés au nom de toute la communauté s’étant volontairement assemblé et sous le bon plaisir de sa majesté, chez mr Arnaud Rubet curé de Marsac pour délibérer sur la proposition qui leur a été faite de renoncer à la religion prétendue réformée sa majesté n’ayant rien plus à cœur que de voir tous les peuples de son royaume réunis sous une même communion ont déclaré et déclare que pour le salut de leur âme et pour marquer à sa majesté le désir qu’ils ont de lui plaire en toutes choses ils renoncent à la religion prétendue et réformée et à toutes les erreurs et promettant en faire abjuration sans aucun retardement et d’embrasser la religion catholique et apostolique romaine pour y vivre et mourir jusqu’au dernier moment de leur vie.
Clairac, St Saturnin de Marsac E Sup 2190 annexe Montarbat vue 9

Suit une litanie, les noms  de ceux qui ont abjuré la RPR (religion prétendue réformée) ce jour là, sur au moins six feuillets.

Dès 1686 apparaissent des mentions curieuses sur les actes de décès. Il y a les paroissiens « ayant reçus les sacrements et ensevelis dans la chapelle », puis ceux « décédés de mort subite et enseveli au petit cimetière ». Il est fort probable que le premier était un « bon » catholique et le second un protestant.

Enterrement à Ornans, Gustave Courbet (1849.1850), musée d’Orsay.

27.9.1711 sr pierre balguerie décédé agé de 70 ans sans avoir reçu les sacrements étant mort d’apoplexie et a été enseveli dans son bien le 12 du mois
vue 154/178
le 1 janvier 1712 est décédé à capdemal abraham laperche et a été ensevelie sans avoir reçu les sacremenys de l’église âgé de 36 ans et a été enseveli dans un coin de son jardin
le 6 janvier 1712 est décédé jacques delmestre maitre arquebusier âgé de 40 ans a ce qui nous aété dit par le sr galliné maitre chirurgien de marsac et a été enseveli dans son jardin n’ayant pas reçu de sacrements
le 12 mai 1712 bertrand descamps âgé de 21 ans du village de la bailleige de la juridiction de castaneul a été trouvé noyé au passage de roussannes …de ceux qui le perdirent au castaneul et a été enseveli au cimetière de la psse de marsac par moi curé soussigné
le 20 juillet 1712 est décédée sans confession anne delpuch âgée de 50 ans a été ensevelie au jardin
vue 169 /178
mai 1714 est décédé maitre Arnaud rebel pretre et curé de la présente psse de marsac et qui a été inhumée ce jourd’hui 20 dans la chapelle de l’église dudit marsac
curé de laparade
le 20 aout 1714est décédée marie delbreil âgée de 47 ans ou environ femme à pierre martineau maitre tonnelier laquelle sera inhumée dans le lieu ou l’on jugera à propos par lavigne marchand
5.8.14 est décédée isabelle marau âgée de 35 ans nouvelle convertie laquelle on peut inhumer ou bon lui semble
6.10.1714 est décédée Jeanne fournier âgée de 60 et quelques ans nouvelle convertie sans avoir reçu aucun sacrement sera inhumée dans le jardin en présence de Moyse P… son fils.
Il existe un document complémentaire dans les archives de Clairac qui est encore plus explicite. Tous les actes de décès sont écrits sur le même modèle par le juge:
En ce jour de … se sont présentés devant nous juge désigné, qui Jean Bizet marchand perruquier et jean lafargue marchand poilier, étant cousin de jacques guérin marchand, lesquels nous ont dit ledit Guérin décédé depuis ce jourd’hui, habitant la présente ville, âgé de 69 ans ou ou environ était nouveau converti, ne faisant point son devoir et s’étant adressé au sr vicaire pour lui faire donner terre.sainte ce qu’il aurait refusé de faire, c’est pourquoi ils nous requièrent de leur vouloir permettre de faire ensevelir le ci devant Guérin en terre profane de nuit conformément à la législation du roi ce que nous juge susdit leur avons accordé faire à la charge  de nous indiquer le lieu de sépulture et nous avons signé avec notre greffier…
AD 47 Clairac E SUP_2201 vue

Un registre postérieur, (AD 47 E SUP 2201, 1739, 1751,1760) est semblable, maître Jean Bertrand procureur officie alors.

En 1750 (vue 9) il est ajouté la mention « de lui permettre de l’ensevelir en terre profane à une heure nocturne sans aucun attroupement ni assemblée le tout conforme aux ordonnances du roi.

Depuis la révocation de l’Edit de Nantes, l’enterrement des protestants était encadré.

11 décembre 1685, une déclaration spécifie que les deux plus proches parents du défunts -ou à défaut les deux voisins les plus immédiats- devait notifier le décès au juge royal ou au juge seigneurial et signer le registre tenu à cet effet par lesdits juges.

Une lettre circulaire rédigée par Louis XV le 9 avril 1736,  reprécise les règles de tenue des registres paroissiaux, et en particulier les règles concernant la sépultures des protestants, ce qui explique la modification des mentions.

Tout est dans la formule;
Est décédé après avoir reçu les sacrements de pénitence

ou est décédé de mort subite…..

D’où l’importance de lire non seulement les noms mais également la formule employée le plus couramment par le curé de la paroisse. Les termes peuvent changer en fonction du rédacteur et la nuance est quelques fois subtile.
Enterré au grand ou au petit cimetière. Certaines paroisses enterraient les protestants dans un cimetière plus éloigné de l’église.
A reçu les sacrements ou aucune mention. Dans ce cas tout dépend de la formulation habituellement utilisée par le curé.
Est enterré dans la chapelle ou est enterré dans son jardin. la formule est plus explicite.

Dans le Poitou ou en Aquitaine, les règles étaient les mêmes et les ordonnances du roi  furent donc suivies avec quelques nuances dans la rédaction.

 

 

 

Education et vie d’un jeune seigneur Bas-Poitevin au 17e siècle.

C’est un exemple de sérendipité quand en faisant une recherche sur un ancêtre poitevin je trouvai  quelques pages sur l’éducation au 17e siècle d’un jeune seigneur Bas-Poitevin, par Louis Duval, extrait de la Revue du Bas-Poitou de mars 1901. Il s’agit d’un opuscule écrit par Jean de Larcher, 24 ans, précepteur appelé au château de Beaupuy, situé à Mouilleron-en-Pareds (Vendée) pour s’occuper de l’éducation d’un jeune garçon.

L’élève s’appelait Jacques CHAUVINIERE, deuxième du nom, fils de Jacques CHAUVINIERE décédé avant 1606 et de Claude de La Haye. Il avait dix ans au moment où sa mère fit venir un précepteur au château, comme cela se pratiquait à cette époque dans ce rang de la société et était donc contemporain de Louis XIII (1601.1643). Jean de Larcher dédia un poème à son jeune élève, intitulé « institution à son adolescence » où il raconta les conseils donnés. Voici ses commandements:

Au moment de la prière de 7h à 10h du matin,

Ne soyez pas si tot le matin eveillé
de chausses de capes et de pourpoing habillé
que n’ayez dans la main un Psautier ou des Heures
Pour prier Sa bonté de sept à dix heures
… Il vous conserve sain, le priant qu’il vous donne
La grâce de de pouvoir tout le cours de vos ans
Vivre en homme de bien, abhorrant les méchants,
Fuyant les vicieux comme une noire peste,
….. le priant aussi
qu’il maintienne la paix en ce royaume ici…
sans oublier de prier la mémoire de son père défunt.
Vient l’heure de se mettre à table, il parle alors de la façon dont il doit s’y tenir.
Ostés votre chapeau, le prenant par le bors,
Faites la révérence et d’un gentil abord
Prenez votre escabeau, et d’une belle grâce
tenez vous sans mouvoir toujours en une place
estendez tout autour de votre jeune flanc
et sur votre estomach le linge bel et blanc
qui nous est préparé; et de pleine abbordée
ne vous jetez glouton sur la caille lardée
sur le petit poulet ou sur le perdriau.
Après les prières de 7h à 10h, le repas pris en se tenant bien et sans gloutonnerie, ce jeune seigneur de dix ans doit savoir parler latin avec les personnes ayant quelques savoir, mais plus encore,
Tachez subtilement de le faire parler
Soir grec soit latin afin de lui volier 
Quelque rare joyau de sa belle doctrine.
Le repas fini, le précepteur autorise le jeu d’échec sans miser plus d’un écu, vient ensuite l’étude pour préparer son avenir.
Le maître veut que son élève aille ensuite achever ses humanités à Paris et consacrer deux années aux belles lettres, deux années à la philosophie, deux années d’exercices  qui conviennent à un gentilhomme; équitation, danse, escrime et musique comme l’art de jouer du luth.
Il deviendra un cavalier accompli et sera alors autorisé  à prendre un mois de vacances à Beaupuy afin d’informer sa mère de ses progrès et la remercier.
Pour rendre seulement de votre apprentissage 
votre mère contente, et la prier de voir 
si ses double ducats qu’elle voulait avoir 
ne l’incommodent point?….
Il lui faudra voyager, visiter l’Italie, l’Allemagne « pour apprendre les mœurs des peuples étrangers ». Rentré à Beaupuy, il reservera à son vieux maître un abri en son château.
« pour vivre sans souci, le reste de sa vie…. »
Une belle éducation comme on en fait plus, me direz-vous, attendez la fin.
Jacques Chauvinière rentré a Beaupuy, mènera grand train, aura six chevaux, deux laquais, un page, portera des vêtements de « soye, de sarge et de burail ».pas de broderie d’or ni d’argent, pas de points de gênes ni de Venise mais de simples passements d’Alençon ou d’Auvergne.
Bien sûr, il chasse, avec six bassets, six espargneux flairants, un clabaudant limier et douze chiens courants, avec deux lévriers, un faucon au carnage, un petit espervier, et un ramage pour les champs découverts.
Son éducation de cavalier et de chasseur dut être parfaite puisqu’il en fit son métier et  devint lieutenant de la vénerie du roi.

Le Nain, les frères. La réunion d’amateurs ou l’Académie.vers 1640

Vers 1614, il épousa Marie de La Touche et eut une fille Françoise Chauviniere. En seconde noces, Jacques Chauviniere épousa le 7 août 1740, Jacqueline Robert, avec qui il eut un fils Henri.
Sa carrière connu son apogée en 1642, quand  Beaupuy fut  érigée en baronnie par lettre patente du mois de septembre 1642 en faveur de Jacques Chauviniere, lieutenant de la vénerie du roi.
Une éducation bien menée, une belle carrière. Mais c’est en recherchant ce qu’est devenu ce Seigneur de Beaupuy que je trouvai un article, où impliqué dans une enquête criminelle, un Jacques Chauninière Seigneur de Beaupuy refusa de payer son dû  à une femme et ses filles qu’il avait violées, envoya ses domestiques pour régler ses comptes, battre et dépouiller les « suppliants »… une histoire plutôt sordide.
Le 20 octobre 1634,  le tribunal des Grands-Jours de Poitou, eut à entendre une requête criminelle contre Jacques Chauvignière, sr de Beaupuy « présentée par Martin Nepveu et Marguerite Brion, sa femme, auparavant veuve de René Jaulin, contenant que Mre Jacques Chauvinière, chevr sr de Beaupuy, en hayne des poursuittes contre luy faites, pour le payement des sommes par luy dues à lad. Brion, l’ayant rencontrée dans un bois, l’auroit forcée et viollentée en son honneur, battu et excedde led. Nepveu, viollé et forcé Hillaire et Renée Jauslain, fille de lad. Brion ; mesme ayant iceluy Nepveu et un sien frère, esté rencontrez sur un grand chemin par les nommez Poictevin, dit Martinière, Jacques Moreau, Denis Jeudy et autres serviteurs domestiques dud. de Beaupuy, ilz les auroient despouillez nuds et iceulz excessivement battus, à coups de bastons et estrivières ; dont ilz auroient faict plainte à la cour de parlement et obtenu permission d’informer, comme aussy esté informé par le prévost de Luzignan, à l’encontre dud. Poictevin, Jacques Thibaudeau, dict la Garenne, Jacques Esnard, le nommé Maraudé, vallet de chambre dud. de Beaupuy, Jean Jasnière, son palfrenier et autres, lesquels seroient venus de nuict en la maison des supplians et iceulx battu et exeddé, particulièrement led. Nepveu, qu’ilz auroient laissé pour mort ; requérant leur estre permis faire informer desd, viollances, incestes et voyes de faict, etc… »
Jacques Chauviniere mourut en 1644.

Petites phrases, maximes et proverbes généalogiques.

Suite logique de l’article précédent et quelques lectures plus tard, voici quelques phrases ou maximes qui m’ont marquée.

Pourquoi fait-on de la généalogie? Je laisse Claude Levi-Strauss répondre à ma place.

« Chercher ses racines, c’est au fond se chercher soi-même : qui suis-je ?
Quels sont les ancêtres qui m’ont fait tel que je suis ? Des noms d’abord, des dates, quelques photos jaunies ou, avec plus de chance, un testament, une lettre. »
Claude Levi-Strauss

Si on recherche d’abord des noms et des dates, on aime trouver aussi leur signature, des photos ou une trace écrite. Les photos de mes ancêtres ne sont malheureusement pas annotées. Ainsi sur la plus-part, il n’y a rien et sur quelques unes, il y a « mon grand père », mais de qui ? Seule certitude, c’est un ancêtre.

Il faut bien admettre que nous sommes l’addition de tous nos ancêtres d’abord dans les gênes, puis physiquement. Je parle de l’hérédité. J’aime bien l’image qu’en a fait Oliver-Wendell-Holmes.

L’hérédité est comme une diligence dans laquelle tous nos ancêtres voyageraient. De temps en temps, l’un d’eux met la tête à la portière et vient nous causer toutes sortes d’ennuis.
Artiste, écrivain, Essayiste, Médecin, Poète, Scientifique (1809 – 1894)

L’image d’un ancêtre qui met la tête à la portière est particulièrement réjouissante, sauf si on imagine qu’ils nous apportent leurs maladies. On en vient à souhaiter qu’ils restent sagement dans la diligence. Ma généalogie est régionale, même si il y a plusieurs régions, ils se marièrent souvent entre eux, avec donc un fort taux d’endogamie. Le risque de voir l’un d’entre eux mettre le nez à la fenêtre est donc important.

Mais,Sénèque nous met en garde et il ne s’agit pas d’hérédité, mais bien de notre façon de penser, de communiquer via un blog ou autres sur nos ancêtres.

« Qui s’enorgueillit de ses ancêtres, loue les exploits d’autrui. »
Sénèque

On touche à la pratique de la généalogie, ce qu’on en dit, ce que l’on en fait. Une particule de nos ancêtres ne fait pas de nous des nobles, un fait éclatant ne rejaillit pas sur nous, un ancêtre artiste ne fait pas de nous un artiste. Mais cela fait du bien d’en parler. Tant pis pour Sénèque. A contrario, un ancêtre peu respectable ne nous rend pas malhonnête, c’est rassurant.

Plus sérieusement, quand on a dépassé les « qui suis-je », « les exploits » de nos ancêtres, il nous reste ce que nous transmettons à nos descendants. C’est un autre proverbe qui me parait illustrer cette situation.

On ne peut donner que deux choses à ses enfants, des racines et des ailes. Proverbe juif.

Des racines et des ailes, outre le rappel d’une émissions TV, fait rêver. Leur donner des racines généalogiques revient à les ancrer dans le sol pas forcement local ni régional, mais leur donner un sentiment d’appartenance. Quant aux ailes, je vous laisse imaginer, la liberté de voler plus loin, plus haut…

Je pense avoir résumé ma pratique généalogique, le dernier proverbe étant mon préféré; il est tourné vers l’avenir.

NE PAS ÊTRE VOYEUR MAIS TÉMOIN ET PASSER LE RELAI…...